Les dessins Warlpiri sont une puissante collection de 169 dessins anthropologiques aborigènes au crayon qui dépeignent les périodes turbulentes que les artistes ont vécues entre 1953 et 1954.
Cette période a été marquée par des bouleversements importants dans la vie du peuple Warlpiri, car ils ont été déplacés de force de leurs terres ancestrales vers une nouvelle colonie gouvernementale à Hooker Creek, aujourd'hui connue sous le nom de Lajamanu, en 1948.
La genèse de ces dessins peut être attribuée au célèbre anthropologue Mervyn Meggitt. Meggitt, reconnaissant la valeur intrinsèque de la narration visuelle, a encouragé les hommes et les femmes Warlpiri à créer des dessins au crayon comme méthode de collecte de matériel de recherche inestimable. Son objectif principal était d'approfondir l'organisation sociale du groupe Warlpiri tout en perçant les mystères des dessins totémiques intimement liés au rêve Warlpiri. Ces conceptions avaient une signification profonde dans le domaine des pratiques cérémonielles et spirituelles.
Initialement considérés comme des matériaux de recherche plutôt que des œuvres d'art conventionnelles, ces dessins étaient considérés comme un moyen pour le peuple Warlpiri de naviguer et de comprendre les émotions complexes suscitées par leur réinstallation. Les dessins représentent un large éventail de sujets, allant de la beauté austère des paysages désertiques et de la vie quotidienne de la colonie à la tapisserie complexe des connaissances cérémonielles et cosmologiques. Ces images témoignent d’un sentiment poignant de nostalgie de la terre dont ils ont été déracinés, mêlé à un effort palpable pour tisser des liens avec le paysage inconnu qui les enveloppait désormais.
Les dessins Warlpiri revêtent une profonde signification historique car ils racontent le voyage ardu entrepris par le peuple Warlpiri depuis sa chère demeure ancestrale jusqu'à sa nouvelle colonie à Lajamanu. Ces œuvres d'art offrent un aperçu complexe des obligations profondes et des relations des artistes avec leurs terres traditionnelles, un voyage qui les a menés à travers la vaste étendue du désert de Tanami. C’est un rappel poignant de leur dévouement inébranlable à l’ascendance tribale et aux cérémonies sacrées, même face aux déplacements et aux changements.
Ce qui distingue les dessins Warlpiri des autres formes d'art indigènes est leur utilisation distinctive de couleurs vives et éclatantes. Contrairement aux ocres terreuses traditionnelles généralement associées à l’art aborigène, ces dessins au crayon utilisent une palette riche et saisissante. Remarquablement, ces dessins sont antérieurs de deux décennies aux peintures acryliques emblématiques de Papunya, ce qui en fait l’un des premiers exemples d’œuvres d’art aborigènes occidentales.
L'importance de ces travaux a été mise à nouveau au premier plan en 1980 lorsque le chercheur Stephen Wild les a revisités en consultation avec des hommes Warlpiri plus âgés. Lors de cette réévaluation, il a été établi que 50 des dessins contenaient des thèmes destinés exclusivement au public masculin et devaient, à ce titre, être protégés de la vue du public. Créés initialement à des fins de recherche, ces dessins n’étaient soumis à aucune restriction ni censure. Cependant, une fois leur classification passée à celle d’œuvres d’art, les créations sensibles et sacrées des Warlpiri ont été soigneusement retirées de la collection.
Lorsqu'ils sont juxtaposés à l'art indigène destiné à la vente commerciale, les dessins Warlpiri révèlent une forme d'expression unique caractérisée par un sentiment d'innocence, d'ouverture et un profond désir de transmettre des connaissances intimes. Aujourd'hui, cette remarquable collection constitue un rappel poignant de l'impact profond de la réinstallation forcée sur les communautés autochtones et de leur capacité durable à maintenir des liens avec leurs terres ancestrales, même lorsqu'elles ont forgé de nouveaux liens dans le contexte de la vie en colonie. Les dessins Warlpiri témoignent donc de la résilience, de l’adaptation et de l’esprit durable du peuple Warlpiri.